Dans son introduction à l'Intégrale des Nouvelles de Robert Louis Stevenson (édition Phébus, 2001, volume 1, p. 10), Michel Le Bris écrit à propos de l’auteur:
“Le choix du récit bref rejoignait son rejet de l'idéologie réaliste, et plus généralement de la description. La nouvelle lui permettait surtout d'affirmer ce à quoi il tenait le plus: ce privilège accordé d'abord à l'image, non plus donnée comme décalque d'un quelconque réel, mais comme vision, projection de l'imaginaire imposant sa puissance créatrice au réel et le transfigurant. L'idée d'un pouvoir plastique de l'imaginaire est en effet au centre de la plupart des œuvres ici réunies, induisant une conception presque abstraite de l'art. Sa manière de procéder est toujours la même: une ou deux images, trois au maximum, issues dirait-on d'un rêve mauvais, visions arrachées ‘au cœur des ténèbres’, autour desquelles enrouler une intrigue ‘au fil de fer’, dont aucune digression ne viendra atténuer l'intensité. Comme s'il s'agissait d'exprimer d'abord la quintessence d'un instant énigmatique, dont la fulgurance ne cessera plus ensuite de nous hanter, telle une note appelée à entrer en résonance avec les lointains. Toute la magie de Stevenson est là, dans ce processus de condensation si contraire à la pratique narrative victorienne vouée à ces romans-fleuves en trois volumes qui, dans le sillage de Dickens et de Wilkie Collins, semblaient alors incarner la seule voie possible de la fiction.”
L'être parlant est soumis à l’ordre de la langue . Il l’est depuis son plus jeune âge et jusqu'à son dernier souffle. Et il l’est quel que soit son milieu social, son niveau de culture et son désir éventuel de “faire péter les règles”. À l’intérieur de cet ordre, il trouve sa liberté mais il n’est pas libre de s’en affranchir. Pour autant, s’il y est soumis depuis toujours, ce n’est pas depuis toujours qu’il en a conscience. Le petit enfant parle comme il respire, ce qui signifie que la langue qu’il parle et qu’il entend est pour lui un élément naturel, au même titre que l’air. Et il parle aussi comme il bouge ses bras et ses jambes, ce qui signifie qu’il a le sentiment que cette langue lui appartient aussi bien que son corps. Et il reste dans cette douce illusion jusqu'au moment de sa rencontre avec l'écrit. L'école a pour mission de ménager cette rencontre et de la nourrir. Les personnes qui nous gouvernent, et qui souvent sont fort instruites, peuvent décider que...
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