Accéder au contenu principal

Articles

Affichage des articles du février, 2025

Titus (6)

La première fois, c’est pour un mariage. Un certain George Roberts l’appelle chez lui, un soir, et lui dit qu’il cherche un musicien pour un mariage. Pas pour la cérémonie qui aura lieu à l'église mais pour la petite fête qui réunira ensuite les deux familles chez les parents du marié. Titus demande s’il doit se mettre en quête d’autres musiciens, ou si d’autres musiciens ont été prévus, mais son interlocuteur lui répond que non. “Nous ne voulons pas un orchestre, juste un musicien qui joue au milieu de nous, comme un invité parmi les autres qui serait venu avec son instrument. Vous voyez ce que je veux dire?” Titus répond que oui, encore qu’il soit surpris et qu’il cherche à ne pas le laisser paraître. L’homme au téléphone mentionne alors l’adresse de l’appartement où aura lieu la réception, et c’est dans la rue Horta Seca, à deux pas de la place Largo de Camões, puis il annonce le montant du cachet, et celui-ci est beaucoup plus élevé que ce à quoi Titus pouvait s’attendre. Pour ...

Titus (5)

“Vous savez avec quelle curiosité Titus avait découvert les outils numériques. Il s'était familiarisé avec eux dès la fin des années 80, mais la grande révélation ce fut une dizaine d’années plus tard, quand Google a lancé son moteur de recherche. C’est le moteur de recherche de Google qui a inspiré à Titus son grand projet, et tout de suite, il a commencé à partager avec trois ou quatre amis ses premières notices. Je faisais partie du nombre. — Vous avez eu de la chance! J'aurais bien aimé les voir, moi aussi, ces notices. Vous m’intriguez. De quoi était-il question? — De jazz, bien sûr. De quoi d’autre aurait-il pu s’agir? Titus avait décidé de consacrer une notice à chacun des musiciens qu’il avait connus, comme à ceux qu’il n’avait pas connus personnellement mais qui avaient compté pour lui. Il avait intitulé ce projet Le Jazzophile , et il l’avait installé sur un blog. — Pardon, je vous entends, j’ai toute raison de vous faire confiance, mais j’ai du mal à le croire. Comme...

Titus (4)

Quand je suis arrivé à Lisbonne, je savais par qui et pourquoi Titus avait été agressé. Maintenant je peux le dire. J’en avais l’intuition, qui devait m'être confirmée par Evaristo. Ou peut-être est-ce seulement quand Evaristo a parlé, quand il a ouvert la bouche, que les pièces du puzzle se sont mises en ordre dans ma tête. Se sont emboîtées soudain dans mon esprit d’une manière qui m’a paru tout de suite évidente. Comment savoir? Nous savons tant de choses que nous ne savons pas savoir. Ou que nous ne voulons pas savoir, tant que cela est possible et tant que cela nous arrange. Ce qu’il y avait à savoir, je le savais déjà. Ou, du moins, je pouvais le déduire de ce que je savais. Sans grand risque d'erreur. Et puis, Evaristo m’a dessillé les yeux. Une infirmière venait le veiller, la nuit. Je l’avais recrutée dès le lendemain de mon arrivée. Elle s'accommodait de somnoler dans un fauteuil, près de son lit. Ce soir-là, j’attendais son arrivée pour partir. J'étais pris d...